Appréciation de la faute d’omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal

Photo de profil - QUELENNEC Kristell | Avocat associée | Lettre du Restructuring

QUELENNEC Kristell

Avocat associée

Cass. com., 4 juillet 2018, n°14-20.117

L’omission de déclarer, dans le délai légal, la cessation des paiements s’apprécie au regard de la seule date de cessation des paiements fixée dans le jugement d’ouverture ou dans un jugement de report.

Ce qu’il faut retenir : L’omission de déclarer, dans le délai légal, la cessation des paiements s’apprécie au regard de la seule date de cessation des paiements fixée dans le jugement d’ouverture ou dans un jugement de report.

La condamnation du dirigeant social à supporter l’insuffisance d’actif ayant été prononcée au visa de plusieurs fautes de gestion, la cassation encourue pour l’une d’entre elles emporte la cassation de l’arrêt dans son entier.

Pour approfondir : Par cet arrêt, la Haute juridiction réaffirme deux principes jurisprudentiels établis, l’un tenant à l’appréciation de la date de cessation des paiements, l’autre aux principes de légalité et de proportionnalité des fautes de gestion justifiant la condamnation du dirigeant à supporter l’insuffisance d’actif.

En l’espèce, le liquidateur d’une société placée en liquidation judiciaire avait assigné son dirigeant sur le fondement des dispositions de l’article L. 651-2 du code de commerce considérant qu’il avait commis une faute de gestion pour avoir déclaré tardivement la cessation des paiements de sa société et, en tout cas, hors le délai légal des 45 jours. Le jugement d’ouverture ayant prononcé la liquidation judiciaire avait pourtant fixé cette date de cessation des paiements dans ce délai légal, sans que celle-ci n’ait ultérieurement fait l’objet d’un jugement de report.

Aussi, pour condamner le dirigeant de ce chef, la Cour d’appel – suivant en cela la position du liquidateur – a estimé qu’un certain nombre d’éléments corroboraient une date de cessation des paiements antérieure à celle fixée par le jugement d’ouverture.

C’est sans surprise que la Cour de cassation censure les juges du fond. C’est l’occasion pour elle de rappeler, aux termes de deux attendus limpides :

  • D’une part, « Qu’en statuant ainsi, alors que la date de cessation des paiements avait été fixée par le jugement d’ouverture au 16 février 2009, la Cour d’appel, qui n’a pas apprécié au regard de cette seule date les conséquences de la non-déclaration de l’état de cessation des paiements par le dirigeant, a violé le texte susvisé ; » ; cette solution n’est pas nouvelle (Cass. com., 4 nov. 2014, n°13-23.070) et consacre l’autorité de chose jugée attachée au jugement d’ouverture qui s’étend à la date de cessation des paiements.
  • D’autre part, « que la condamnation à supporter l’insuffisance d’actif ayant été prononcée en considération de plusieurs fautes de gestion, la cassation encourue à raison de l’une d’entre elles entraîne, en application du principe de proportionnalité, la cassation de l’arrêt de ce chef » ; c’est ce qu’imposent les principes de légalité et de proportionnalité en application desquels les juges du fond qui, s’ils peuvent retenir la responsabilité du dirigeant sur le fondement de l’article L.651-2 pour une unique faute, doivent en cas de pluralité de fautes de gestion, s’assurer que chacune d’elles est légalement justifiée et à contribuer à l’insuffisance d’actif (Cass. com., 15 déc. 2009, n°08-21.906 ; Cass. com., 3 mai 2011, n°10-16.709).

A rapprocher : Cass. com., 4 nov. 2014, n°13-23.070 ; Cass. com., 15 déc. 2009, n°08-21.906 ; Cass. com., 3 mai 2011, n°10-16.709

Sommaire

Autres articles

Précisions sur le point de départ de l’action tendant au prononcé de sanctions personnelles en cas d’ouverture d’une liquidation sur résolution d’un plan
Précisions sur le point de départ de l’action tendant au prononcé de sanctions personnelles en cas d’ouverture d’une liquidation sur résolution d’un plan Cass. com., 23 nov. 2022, n°21-19.431   Ce qu’il faut retenir : En application de l’article L. 653-1,…
Responsabilité pour insuffisance d’actif et conversion en liquidation : exclusion des fautes commises au cours de la période d’observation du redressement
Responsabilité pour insuffisance d’actif et conversion en liquidation : exclusion des fautes commises au cours de la période d’observation du redressement Cass. com. 8 mars 2023, n°21-24.650     Ce qu’il faut retenir : S’agissant de l’application de l’article L.651-2 du Code…
Responsabilité pour insuffisance d’actif et abus du droit d’agir du liquidateur
Responsabilité pour insuffisance d’actif et abus du droit d’agir du liquidateur Cass. com. 14 sept. 2022, n° 21-15.381   La faute de gestion exigée dans le cadre d’une action en responsabilité pour insuffisance d’actif exercée par le liquidateur à l’encontre…
some
Responsabilité pour insuffisance d’actif – Faute de gestion ou simple négligence
Cass. com., 13 avril 2022, n°20-20.137 Il résulte de l’article L. 651-2 du Code de commerce qu’en cas de simple négligence dans la gestion de la société, la responsabilité du dirigeant au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée. La rupture brutale des…
some
Qualité d’associé de GAEC ou d’une SCI : procédure collective ou surendettement des particuliers ?
Cass. com., 16 décembre 2021, n°20-16.485 et 20-18.344 La seule qualité d’associé d’un GAEC ou d’une SCI ne suffit pas à faire relever la personne concernée du régime des procédures collectives et à l’exclure du champ d’application des dispositions du…
some
Indivisibilité de la procédure de vérification des créances, droits propres du débiteur et notification à l’adresse personnelle de son représentant légal
Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – chambre 9, 20 janvier 2022, n°21/09000 La procédure de vérification du passif étant indivisible et le débiteur disposant, en cette matière, d’un droit propre, la déclaration d’appel contre l’ordonnance de rejet du Juge…