Précisions sur le point de départ de l’action tendant au prononcé de sanctions personnelles en cas d’ouverture d’une liquidation sur résolution d’un plan

Précisions sur le point de départ de l’action tendant au prononcé de sanctions personnelles en cas d’ouverture d’une liquidation sur résolution d’un plan

Cass. com., 23 nov. 2022, n°21-19.431

 

Ce qu’il faut retenir :

En application de l’article L. 653-1, II, du Code de commerce, les actions en faillite personnelle ou interdiction de gérer engagées par le liquidateur judiciaire à l’encontre du dirigeant se prescrivent par trois ans à compter du jugement qui ouvre la procédure de redressement ou liquidation judiciaire. Ainsi, en cas d’annulation d’un jugement qui prononce une liquidation judiciaire après résolution d’un plan entraînant l’anéantissement rétroactif de cette décision, le délai de prescription triennal court à compter de la nouvelle décision d’ouverture de la procédure.

 

Pour approfondir :

En l’espèce, un entrepreneur a été placé en redressement judiciaire le 5 juillet 2012.

La procédure a, par suite, été étendue à trois sociétés civiles immobilières dont ce dernier était également le dirigeant.

 

Un plan de redressement a été arrêté en janvier 2013.

Faute d’avoir été respecté, le plan de redressement a été résolu par jugement en date du 7 avril 2016 ; entraînant ainsi l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire.

 

Ledit jugement a été annulé pour irrégularité de procédure.

Par suite, un nouvel arrêt du 7 novembre 2016 a prononcé la résolution du plan de redressement et ouvert une nouvelle procédure de liquidation judiciaire.

 

Reprochant au dirigeant de ne pas avoir coopéré avec les organes de la procédure et de ne pas avoir tenu de comptabilité, le liquidateur l’a assigné le 19 septembre 2019 aux fins de voir prononcer une interdiction de gérer à son encontre.

 

Par un jugement du 15 décembre 2020, le tribunal de commerce a prononcé une interdiction de gérer, pour une durée de 10 ans.

 

Sur appel du dirigeant, la Cour d’appel de Bordeaux a confirmé ladite sanction.

Le gérant s’est alors pourvu en cassation, faisant grief à l’arrêt d’avoir déclaré recevable l’action du liquidateur comme non prescrite et de prononcer son interdiction de gérer pour une durée de 10 ans alors que, selon lui, « les actions engagées aux fins de voir prononcer la faillite personnelle ou l’interdiction de gérer se prescrivent par trois ans à compter du jugement qui prononce l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation ; que l’annulation par la cour d’appel du jugement qui prononce la liquidation judiciaire, pour une irrégularité de procédure n’affectant pas l’acte introductif d’instance, ne reporte pas le point de départ de cette prescription à la date de l’arrêt qui prononce à nouveau une liquidation judiciaire ».

 

Par le présent arrêt, la Cour de cassation rejette le pourvoi.

Elle énonce en effet que l’ouverture d’une procédure de liquidation après la résolution d’un plan de redressement constitue une nouvelle procédure, de sorte que le délai de prescription de trois ans de l’article L. 653-1, II, du même code commence à courir à compter de la décision d’ouverture de la nouvelle procédure.

 

La Haute juridiction retient, en l’espèce, que dans la mesure où l’annulation du jugement du 7 avril 2016 a privé rétroactivement ce dernier de tout effet, le point de départ du délai de trois ans ne peut être la date du jugement annulé et doit être fixé au 7 novembre 2016, date d’ouverture de la nouvelle procédure de liquidation.

 

En l’espèce, l’assignation du liquidateur ayant été introduite par une assignation du 19 septembre 2019, son action n’était donc pas prescrite.

 

A rapprocher :

Article L. 653-1, II du Code de commerce

 

Un article rédigé par Grace Cofts et Julie Ricau du département Affaires complexes

Sommaire

Autres articles

Responsabilité pour insuffisance d’actif et conversion en liquidation : exclusion des fautes commises au cours de la période d’observation du redressement
Responsabilité pour insuffisance d’actif et conversion en liquidation : exclusion des fautes commises au cours de la période d’observation du redressement Cass. com. 8 mars 2023, n°21-24.650     Ce qu’il faut retenir : S’agissant de l’application de l’article L.651-2 du Code…
Responsabilité pour insuffisance d’actif et abus du droit d’agir du liquidateur
Responsabilité pour insuffisance d’actif et abus du droit d’agir du liquidateur Cass. com. 14 sept. 2022, n° 21-15.381   La faute de gestion exigée dans le cadre d’une action en responsabilité pour insuffisance d’actif exercée par le liquidateur à l’encontre…
some
Responsabilité pour insuffisance d’actif – Faute de gestion ou simple négligence
Cass. com., 13 avril 2022, n°20-20.137 Il résulte de l’article L. 651-2 du Code de commerce qu’en cas de simple négligence dans la gestion de la société, la responsabilité du dirigeant au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée. La rupture brutale des…
some
Qualité d’associé de GAEC ou d’une SCI : procédure collective ou surendettement des particuliers ?
Cass. com., 16 décembre 2021, n°20-16.485 et 20-18.344 La seule qualité d’associé d’un GAEC ou d’une SCI ne suffit pas à faire relever la personne concernée du régime des procédures collectives et à l’exclure du champ d’application des dispositions du…
some
Indivisibilité de la procédure de vérification des créances, droits propres du débiteur et notification à l’adresse personnelle de son représentant légal
Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – chambre 9, 20 janvier 2022, n°21/09000 La procédure de vérification du passif étant indivisible et le débiteur disposant, en cette matière, d’un droit propre, la déclaration d’appel contre l’ordonnance de rejet du Juge…
some
Précisions sur la caractérisation de l’omission volontaire de déclaration de la cessation des paiements
Cass. com., 12 janvier 2022, n°20-21.427 Une mesure d’interdiction de gérer peut être prononcée à l’égard d’un dirigeant alors même que celui-ci n’avait pas une connaissance effective de l’état de cessation des paiements de sa société à la date fixée…