Conséquence du rejet d’une créance déclarée : extinction de la sûreté qui la garantit

Photo de profil - BARRUET Sophie | Avocat | Lettre du Restructuring

BARRUET Sophie

Avocat

Cass. com., 4 mai 2017, n°15-24.854

L’article L.624-2 du Code de commerce, qui prévoit que le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence, ne distingue pas entre les différents motifs de rejet d’une créance déclarée.

Ce qu’il faut retenir : L’article L.624-2 du Code de commerce, qui prévoit que le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence, ne distingue pas entre les différents motifs de rejet d’une créance déclarée. Dès lors, la décision par laquelle le juge-commissaire retient qu’une créance a été irrégulièrement déclarée et ne peut être admise au passif est, au sens du texte précité, une décision de rejet de la créance, qui entraîne, par voie de conséquence, l’extinction de la sûreté qui la garantissait.

Pour approfondir : En l’espèce, une banque a consenti à une société un prêt garanti par un nantissement sur le fonds de commerce de celle-ci. Par jugement du 31 janvier 2006, la société a été mise en sauvegarde et le tribunal a arrêté un plan de sauvegarde en faveur de la société. La banque a déclaré sa créance au passif de son débiteur. Cependant, par ordonnance du 2 juin 2008, devenue irrévocable, le juge-commissaire a considéré irrecevable la déclaration de créance faite par la banque, relevant que cette déclaration avait été faite par l’intermédiaire d’un préposé sans pouvoir régulier. Malgré cette décision, la banque a renouvelé le 20 septembre 2011 son inscription de nantissement sur le fonds de commerce du débiteur. Ce dernier a alors saisi le tribunal afin qu’il ordonne la radiation de cette sûreté.

La Cour d’appel a rejeté la demande du débiteur en retenant que, dès lors que la déclaration de créance avait été déclarée irrégulière, la créance n’était pas éteinte mais seulement inopposable à la procédure.

La Cour de Cassation a censuré la position de la Cour d’appel. La Chambre commerciale a rappelé que l’article L.624-2 du Code de commerce, qui prévoit que le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence, ne distingue pas entre les différents motifs de rejet d’une créance déclarée. Dès lors, la décision par laquelle le juge-commissaire retient qu’une créance a été irrégulièrement déclarée et ne peut être admise au passif est, au sens du texte précité, une décision de rejet de la créance, qui entraîne, par voie de conséquence, l’extinction de la sûreté qui la garantissait.

Par cette décision, la Cour de cassation confirme l’adage selon lequel là où la loi ne distingue pas, il n’y a pas lieu de distinguer. Dans le cas présent, peu importe les motifs de rejet de la créance, la conséquence reste la même : la sûreté est éteinte du fait du rejet par le juge-commissaire de la créance déclarée.

Il convient de préciser que la Cour de cassation avait déjà retenu une position similaire en matière de cautionnement, considérant que la créance rejetée de manière irrévocable est éteinte, et par voie d’accessoire, il en est de même du cautionnement qui l’accompagne.

A rapprocher : Cass. com., 19 octobre 1993, n°91-11.952

Sommaire

Autres articles

Refus de l’exequatur d’une sentence arbitrale contraire au principe de l’arrêt des poursuites individuelles
Refus de l’exequatur d’une sentence arbitrale contraire au principe de l’arrêt des poursuites individuelles Cass. com. 8 févr. 2023, n°21-15.771, publié au bulletin     Ce qu’il faut retenir : Est contraire à l’ordre public international, au mépris du principe de…
some
Bail commercial et interruption de l’action en constat de l’acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers antérieurs
Cass. civ. 3ème, 13 avril 2022, n°21-15.336 L’action introduite par le bailleur avant le placement sous procédure collective du débiteur, en vue de faire constater l’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail commercial pour défaut de paiement des loyers…
some
Revendication du bien vendu avec réserve de propriété entre les mains du sous-acquéreur
En cas de revente d’un bien à un sous-acquéreur, le vendeur initial, bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété, peut revendiquer ledit bien en nature directement entre les mains du sous-acquéreur. Cette action, qui est fondée sur les dispositions
some
Renonciation au transfert de la charge des sûretés décharge de la caution
Le créancier, bénéficiaire d’un nantissement du fonds de commerce de la société débitrice ne peut plus se prévaloir du cautionnement consenti par les co-gérants dès lors qu’il renonce, dans le cadre d’un plan de cession, à son nantissement.
Tierce opposition au jugement d’extension de procédure
Le créancier, qui n’y était pas partie, peut former tierce-opposition à un jugement statuant sur l’extension d’une procédure de liquidation judiciaire à son débiteur, si ce jugement a été rendu en fraude de ses droits ou s’il invoque des moyens
Ratification implicite d’une créance déclarée avec un pouvoir irrégulier
Le créancier peut ratifier la déclaration faite en son nom jusqu’à ce que le juge statue sur l’admission de la créance. Aucune forme particulière n’est prévue pour cette ratification, ce dont il résulte qu’elle peut être implicite.