Fixation de la date de cessation des paiements après cessation de l’activité professionnelle

Cass. com., 4 juillet 2018, n°17-16.056

Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire d’un commerçant, radié du registre du commerce, n’est plus soumise à la condition que soit établi un état de cessation des paiements antérieur à la radiation.

En l’espèce, le 14 avril 2014, une commerçante a été radiée du registre du commerce et des sociétés. Elle a été assignée ultérieurement par le comptable des finances publiques du pôle de recouvrement spécialisé pour non-paiement d’une dette de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l’année 2013.

Suivant jugement du 28 avril 2015, l’ancienne commerçante a été placée en liquidation judiciaire et la date de cessation des paiements a été fixée au 31 mars précédent. Sur appel de cette dernière, la Cour d’appel d’Angers, par un arrêt du 25 octobre 2016, a confirmé l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire. La débitrice a alors formé un pourvoi en cassation.

Au soutien de ses prétentions, elle fait grief à l’arrêt de la Cour d’appel de confirmer l’ouverture de sa liquidation judiciaire en fixant la date de cessation de ses paiements au 31 mars 2015, soit postérieurement à sa radiation du registre du commerce et des sociétés intervenue le 14 avril 2014.

Selon son raisonnement, une procédure de liquidation judiciaire ne peut être ouverte qu’à l’égard d’un débiteur déjà en état de cessation des paiements lors de la cessation de son activité professionnelle.

Par un arrêt du 4 juillet 2018, publié au bulletin, la Cour de cassation rejette le pourvoi en ces termes : « Mais attendu que l’arrêt retient exactement que, selon les articles L.631-3, alinéa 1er, ou L.640-3, alinéa 1er, du code de commerce, l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires à l’égard d’un commerçant radié du registre du commerce n’est plus soumise, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, à la condition que soit établi un état de cessation des paiements antérieur à la radiation, dès lors qu’existe, lors de l’examen de la demande d’ouverture de la procédure, un passif résiduel exigible à caractère professionnel auquel l’ancien commerçant est dans l’impossibilité de faire face avec son actif disponible ; que le moyen qui postule le contraire n’est pas fondé ».

Les dispositions de l’article L.621-15 du code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 25 janvier 1985, prévoyaient en ces termes que :

« (…) le tribunal ne peut être saisi que dans le délai d’un an, à partir de l’un des événements mentionnés ci-après, et lorsque celui-ci est postérieur à la cessation des paiements du débiteur :
1° radiation du registre des commerces et des sociétés (…),
2° cessation de l’activité s’il s’agit d’un artisan ou d’un agriculteur ».

Ainsi, l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire exigeait que l’état de cessation des paiements précède la cessation d’activité (Cass. com., 26 octobre 1999, n°95-21.913). Cette exigence a désormais disparu avec la loi de sauvegarde du 26 juillet 2005

Selon les dispositions des articles L.631-3 et L.640-3 du code de commerce, le passif du débiteur personne physique retiré doit toutefois provenir, à tout le moins partiellement, de son activité professionnelle (Cass. avis, 17 septembre 2007, n°07-00007 ; Cass. com., 2 juillet 2009, n°08-17.211). Cette solution s’explique par l’interdiction faite à un ancien professionnel de bénéficier de la procédure de surendettement, dès lors qu’il est exigible aux procédures collectives (Cass. com., 2 juillet 2009, n°08-17.211).

Par la présente décision, la Cour de cassation fait une application stricte des textes précités.

A rapprocher :  L.631-3 et L.640-3 du code de commerce ; Cass. avis, 17 septembre 2007, n°07-00007 ; Cass. com., 2 juillet 2009, n°08-17.211

Sommaire

Autres articles

some
L’associé sans mandat social qui s’immisce dans la gestion de la société est un dirigeant de fait
Un associé qui n’est ni salarié ni mandataire social d’une société mais qui joue un rôle de décideur, matérialisé notamment par l’utilisation d’une adresse électronique à son nom au sein de la société, doit être qualifié de dirigeant de fait…
some
La protection renforcée de la caution personne physique en cas d’adoption d’un plan de sauvegarde
La caution personne physique peut se prévaloir des dispositions adoptées dans le plan de sauvegarde vis-à-vis du créancier pour échapper au paiement, dès lors que la procédure collective est ouverte après le 1er janvier 2006, et ce indépendamment de la...
some
Formalisme de l’opposition formée contre un arrêt prononçant la liquidation judiciaire : l’exigence sévère de la Cour de cassation
Le seul mode de saisine de la cour d’appel d’une opposition à un arrêt, rendu par défaut, ouvrant une liquidation judiciaire à l’égard des associés d’une société en nom collectif, est la déclaration au greffe, de sorte que l’opposition formée…
some
Modalités de versement du capital non libéré d’une SARL en cas d’ouverture d’une procédure collective
En cas d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’égard d’une société à responsabilité limitée, le liquidateur judiciaire n’est pas fondé à solliciter le versement de la fraction du capital social non libéré auprès d’un associé...
some
Le caractère exclusif du recours de l’article R.624-8 du Code de commerce pour les associés de SCI
La Cour de cassation précise que l'autorité de chose jugée qui s'attache à la décision irrévocable d'admission d'une créance au passif de la liquidation d'une société civile s'impose à ses associés. Ainsi, l’associé qui n'a pas présenté la réclamation...
some
Action ne relevant pas du monopole du représentant des créanciers : nouvelle illustration
L’action en responsabilité intentée à l’encontre d’une banque pour inexécution d’un mandat de vente des titres d’une société ayant par la suite fait faillite est étrangère à la protection et à la reconstitution du gage commun et ne relève donc…